Enfants perdus, enfants errants.
ils arrivent, ils arriveeeent  c'est le bruit sourd de ses pas, cette précipitation qui provoque un dérapage puis un joli rattrapage. Elle court. Elle court et son coeur résonne si fort qu'il risque de se rompre. Elle apporte le chaos, le désordre, l'affolement. Sa main attrape la poignée si brusquement que son équilibre est incertain, elle apparaît dans la pièce la plus éloignée, saute sur ce lit pourtant semblable aux autres. Seoeon Seoeooon Les voyelles trainent, les mots s'enchaînent à répétition. Elle respire à peine, au point de prendre une grande inspiration avant d'articuler à nouveau. Ils arrivent.

C'est régulier, c'est comme ça depuis leur arrivée. Se Eun retourne l'orphelinat de ses cris, de son excitation. Elle croit qu'on vient la chercher, elle prépare sa valise et celle de son frère aussi. Puis dans les rangs, on voit à quel point elle tient pas, à quel point elle fait des efforts. Alors que lui préfère regarder ailleurs. Il regarde si loin pour ne rien voir d'une cérémonie sans fin.  Ils sont les enfants sans histoire, sans chemin à suivre et à l'avenir encore à écrire. Pour les uns, ce sera bancal. Pour certains, ce sera la course à l'affection. Et pour d'autres encore, ce sera le chemin le plus court vers la porte de sortie. Ils sont les enfants abandonnés, enfants sans parents. Enfants dans un monde d'enfant.

(...)

Ils sont apparus sans même qu'ils ne le prédisent, au moment même où la voix de Seeun commença à s'éteindre. Et quand du jour au lendemain tu deviens un Im, c'est compliqué à gérer, c'est compliqué à porter.

(...)

La faute est évidente à lui brûler les rétine. Il fixe le tableau, cette équation perdue parmi d'autres inscrites à la craie alors que le professeur pourtant poursuit ses explications comme si de rien était. Lui n'a toujours rien noté, il se contente d'observer du fond de la classe. Ca fait bien trop longtemps qu'on porte plus d'intérêt à ses réponses qu'il ne s'attend pas même à un regard… Néanmoins, il hésite à parler. Il inscrit presque machinalement le résultat sur un coin de sa feuille et, à la place, se contente de croiser les bras, d'y enfouir son visage. C'est plus simple comme ça.

(...)

L'insouciance du lycée lui manque. Il a trouvé son équilibre, entre les cours et la vie. Il en a vu beaucoup trop s'éloigner, perdant de vue les amitiés éphémères et celles qu'il aura pensé pourtant solides. Il avance tranquillement, il découvre les plaisirs de l'argent ou s'y enfonce doucement. Il grandit sans grandir.