Les années passent, les habitudes ne changent pas. Il y avait ce même rituel presque rassurant, à enfiler des vêtements dans lesquelles il ne se sentait définitivement pas à l'aise, afin de passer quelques heures entouré de personnes qu'il ne connaissait qu'à peine, seulement histoire de dévaliser un buffet. Il abandonnera sa console dans un soupire de regret et posera ses fesses dans une limousine, récupéré par son père et sa mère jusqu'à la fête organisée. Et lorsqu'on lui demande où est sa partenaire de crime de ce soir - puisqu'il s'était bien trop étouffé au terme de petite amie encore une fois - il avait semblé naturel d'annoncer qu'elle les rejoindrait sur place. Le regard lourd de jugement, il avait simplement insisté que sa noona n'était rien de plus que sa noona, et que ce n'était pas parce qu'il avait une relation à distance avec Alix que ça changerait quoi que ce soit. Un vrai scandale.

Parcourant le chemin tapis de rouge jusqu'aux portes, son père s'était tourné vers lui avant même qu'il n'y pose un pied. D'une discussion brève, les parents Im avaient laissé leur fils à cet endroit précis. Comme quoi, ça ne se faisait pas de laisser sa cavalière le retrouver et qu'il devrait faire un peu plus attention. Resserrant sa veste autour de son corps, il aurait presque sautillé sur place au fil des minutes s'écoulant, s'accrochant à son portable pour se perdre dans le flot de notifications des réseaux sociaux. C'est par hasard si son regard se lève à ce moment-là, l'apparition d'une femme qu'il eut du mal à reconnaitre au point d'y reposer son attention une seconde fois et ce n'était pas faute de l'avoir déjà observé dans cette tenue. Il lève le bras pour attirer elle aussi son attention, tentant un sourire avant de rattraper son portable lui glissant des doigts dans un réflexe maladroit. Un vrai boulet. Noona. Tu as trouvé facilement ? Histoire de bien le signaler à son père que ça va, il ne l'avait pas lâché dans la jungle non plus. Enfonçant les mains dans les poches du costume de sa veste par sécurité, il avait entamé les premiers pas vers l'entrée, laissant s’engouffrer devant eux les nombreux invités. Couples en majorité, l'élégance dans leur prestance et d'un charisme décalé qu'il n'aurait jamais réussi à adopter. Un détail lui saute aux yeux, qu'il ne semblera pourtant jamais avoir remarqué depuis le temps. Oh. La pression de la société et ses attentes.   Si …. tu veux. Il tousse, le poing contre ses lèvres pour en détourner l'attention, alors qu'il lui présente son autre bras. Le geste le moins naturel au monde.

Iseul ne s'était pas rendue compte à quel point être une fille pouvait être si fatiguant. Histoire de bien paraître, elle avait mis tout son cœur dans son maquillage afin qu'il soit parfait. S'y étant prise trop tard, elle n'avait pas pu faire grand-chose à ses cheveux, mais le résultat n'était pas si mal que cela au final. Elle n'avait pas hésité une seule seconde à beugler tous les noms de ses colocataires pour que l'un d'eux vienne l'aider à enfiler sa robe. Ce que Nino daigna finalement faire tout en marmonnant dans sa barbe. D'après ce qu'elle arrivait à comprendre, le plus vieux qualifiait cette sortie de « inutile », « gorgée de vieux hypocrites qui méritaient de s'étouffer avec leurs petits fours et leurs vins périmés » et qu'il préférait « se tirer une balle plutôt que d'y aller ». Des paroles dignes du cubain. « Oui, j'appelle s'il y a un souci Nino. Mais ils ne me feront rien, y a Seo. » lui avait-elle dit avec conviction, mais fallait croire que ça rassurait encore moins le jeune homme.

Ayant convenu de se retrouver sur le lieu du rendez-vous, Iseul avait choisi de venir en taxi. Mais la circulation commençant à devenir critique en s'approchant des lieux, la jeune femme choisit de terminer le chemin à pied. De toute façon, le compteur commençait à monter et elle n'aurait clairement pas eu assez pour payer le trajet entier. Les galères de la fin du mois. Le nez dans son portable, elle tentait de se laisser guidée par la technologie pour trouver le lieu, pendant qu'un de ses bras remontait un peu plus la traîne de sa robe à chaque pas qu'elle faisait. Et lorsqu'elle fut enfin au bon endroit, ce qui n'aurait vraiment pas été difficile à repérer si elle avait suivi toute la chaîne de belles voitures de luxe qui passaient à côté d'elle, Iseul en lâcha un soupir de soulagement. Elle espérait ne pas être arrivée trop tard. En s'avançant lentement vers le tapis rouge, son regard finit par capter celui de Seo qui l'attendait près de l'entrée, agitant vivement ses bras. Avec élégance, elle entreprit de le rejoindre, un sourire aux lèvres. « Hein ? Ah oui, ça va, j'ai pu trouver facilement. » répondit-elle simplement, avant de doucement dévisager le jeune homme face à elle, ainsi que sa tenue. C'est qu'elle lui allait plutôt bien. C'était si rare de le voir dans ce genre de vêtements, et c'était également dans ces moments que la Hwarang constatait la différence entre le Seo de tous les jours et le Im Seoeon qui l'accompagnait à cette soirée. Machinalement, elle l'avait suivi, avant que son attention ne soit subitement captée par son bras levé en sa direction. On pouvait lire un soupçon d'incompréhension sur le visage d'Iseul, peu habituée à ce genre d'attention, avant qu'une illumination ne la prenne. « Oh, avec plaisir. » avait-elle dit en passant son bras autour du sien. Peu importe qu'il paraisse quelque peu maladroit, elle savait aussi que c'était loin d'être son environnement favori, mais elle appréciait grandement le geste. Comme si elle avait été une princesse. Le regard pétillant, la jeune femme ne cessait de tourner sa tête dans toutes les directions, laissant ses prunelles s'accrocher à toutes les richesses qui composaient la salle dans laquelle ils venaient de pénétrer. Un décor qu'elle n'aurait jamais pu imaginé contempler. « Seo... » Sa voix partait déjà dans les aigus étouffés. « Y a une fontaine de chocolat. » remarqua-t-elle avec émerveillement. Elle pensait que ça n'existait que dans les films ces machins. Avec une discrétion qu'on lui connaissait bien, elle avait directement tiré le plus jeune vers le buffet, se fichant éperdument de tous ceux qui les dévisageait depuis qu'il étaient rentrés. « Tu crois je peux mettre des petits fours dans mon sac ? » demanda-t-elle avec beaucoup de sérieux tandis qu'elle calculait déjà le nombre de petits fours qu'elle pouvait réalistement foutre dans son minuscule sac à main. « Ah et tu m'as dit que tu venais avec tes parents, non ? Où sont-ils ? » dit-elle distraitement en commençant déjà à manger.

Ils étaient si loin, l'appartement 404 et la salle d'arcades. L'ambiance sans prise de tête et les vêtements larges, posé sur un canapé à pas se soucier d'avoir une coupe de cheveux présentable ou non. Mais posté à l'entrée des lieux, il pouvait déjà les sentir sur lui, les regards jugeant le fils Im sans réellement le connaître, dans l'attente même de l'héritage de son père à qui il se devait de faire honneur. Seoeon, l’enfant invisible devenu visible le jour de son entrée à l’université, mais au comportement social encore insuffisant. Il lève le bras parmi la foule, attire de nouveau jugements, et bientôt, il ne se soucie plus que d’elle. Elle avait trouvé facilement, qu’est-ce qu’il avait dit ? haha tant mieux...dis, tu pourras le redire devant mes parents stp ? Naturellement, ses pas s’étaient dirigés enfin vers le hall et c’est avec le bras de sa Noona se glissant autour du sien qu’il donna son nom en invitation, les laissant tous les deux s’aventurer plus loin. Sans trébucher sur un plis du tapis pour une fois.

Lui ne s'était pas perdu dans la contemplation de cette salle, de la décoration mêlant modernité, art et surtout l'argent. Son regard ne s’était plus émerveillé depuis si longtemps qu'il se perd à observer à travers les yeux de Iseul. Et il réalisera que c'est vraiment étrange de la voir ici, festivité mondaine et monde de princesse, au tissu soulignant sa silhouette à faire jalouser les femmes. Mais elle n'était décidément pas comme les autres femmes, Iseul, elle était même tellement comme lui qu'elle le surprend de sa voix aiguë, réalisant toujours après coup qu'ils se dirigeaient déjà vers l'endroit le plus important de la soirée ; la nourriture étalée sur de longues tables nappées de blanc. La fontaine en chocolat, c'était galère. Il n'avait plus tenté le coup depuis le premier essai, à s'en être foutu tellement partout que ça avait relevé du massacre. Heureusement que l’humiliation ne tue pas et qu'il soit un pro sur ce terrain là. heu…… Tiens, Alix ne lui avait jamais posé cette question, se contentant le plus souvent d'avaler ce qu'il trouvait plutôt que de penser à l'éventuel après. … oui, je ferais diversion si tu veux. Mes parents font le tour,  c'est un peu le truc ici....dire bonjour Ce dont il n'avait jamais été fan, de toute évidence. Et haussant les épaules, il avait observé sa propre tenue. Tu veux mes poches ? Non parce que ton sac est petit et je vois pas où tu pourrais en mettre, enfin à par........ Moment de blanc. Ses yeux auraient dû se contenter d'en rester sur lui et non sur elle. Il détourne aussi vite son visage, apprenant de sa première erreur. Je. Enfin. Mais pas la fontaine. Dans les poches. Ahah.... Tu veux boire quelque chose ?!  Comment se rattraper. Ah, il suffoquait déjà ici, depuis quand il faisait aussi chaud ?  

« Oui, pas de souci. » répondit-elle avec nonchalance à sa question, ne se rendant pas compte à quel point cette réponse pouvait lui importer. Elle voulait juste savoir quelles gueules les parents de Seo avaient, et plus précisément quelle était l'origine de son comportement si décalé vis-à-vis de la société dans laquelle il était censé avoir grandi. Ce mystère valait la peine d'être élucidé du point de vue de la jeune femme. C'était ce qu'elle s'était promise de faire en traversant l'entrée de la salle de son air faussement assuré. Elle n'avait aucune idée de ce qu'elle devait faire à partir de ce point-là, mais son instinct avait repris le dessus, l'emportant sans attendre vers un buffet qui n'allait pas tarder à se faire dévaliser. Littéralement. Quitte à ne pas pouvoir faire rentrer les 404 et 403 dans un tel endroit, elle pouvait au moins se permettre leur ramener un petit souvenir. Ainsi, elle ne se préoccupa que très peu des regards qui avaient fini par les assaillir tous deux en silence, la jalousant peut-être, la jugeant sûrement. Iseul n'était qu'une fille banale venant du fin fond de Jeju qui s'apprêtait à voler des petits fours en compagnie de son accolyte hésitant. « Diversion ? Ah non, pas la peine. Ça me dérange pas de les rencontrer moi. » répondit-elle sur un ton léger en ouvrant son sac. La Hwarang y fit un peu de place, même si c'était franchement limité, puis elle entreprit d'y fourrer les premiers trucs qu'elle avait sous la main. Si bien qu'elle ne remarqua pas le regard égaré de son partenaire du soir. Il ne faudrait pas qu'il lui rappelle l'incident fâcheux qui s'était produit quelques jours plus tôt. « Faire le tour pour dire bonjour ? On ne peut pas se contenter de dire un bonjour général puis d'aller bouffer ? » demanda-t-elle, perturbée. C'était ce qu'elle faisait toujours en soirée, afin d'éviter de faire un handshake à tout le monde, ce qui aurait été une perte de temps monumentale. « Tiens, mets-en dans tes poches. » souffla-t-elle en mettant elle-même le reste des petits fours dans les poches de Seo, en commençant par celles de sa veste, puis celles de son pantalon, contribuant un peu plus à la chaleur qu'il pouvait ressentir. « Ni vu ni connu. » Un sourire prit place sur son visage tandis qu'elle reprenait le bras du jeune homme. « Nope, je n'ai pas encore soif, mais c'est sympa. Tu veux boire un coup toi ? Tu commences à être un peu rouge. On pourra passer à la fontaine de chocolat après. » La deuxième chose phare de la soirée selon elle. Mais à tous les coups, ils allaient en foutre partout.

Ce monde dans lequel il n’avait jamais appartenu, en total décalage avec son enfance passée entre les murs d’un orphelinat. Apparu un jour à l’âge de ses quatorze ans et totalement ignoré par la société, il avait fait ses premiers avec la reconnaissant d’aucune légitimité. Il n’était pas un Im, pas vraiment un. Puis en grandissant, le désintérêt et son comportement avaient suffi à n’attirer l’attention de personne, devenant une simple ombre obligatoire, réussissant à échapper à la corvée de présentation. S’incliner poliment face à tous ses visages dont il ne se souciait pas de retenir le prénom. Seulement depuis son début de parcours, il ne pouvait plus contourner l’évidence qu’il s’agirait bel et bien de son destin. Et il y avait un certain progrès. Vêtu d’un costume d’occasion au bras d’une femme, Im Seoeon n’avait jamais paru aussi intégré...si les regards n’avaient pas aperçu le nouveau duo foncer sur le buffet, prêt à emporter un plat entier de petits fours dans les poches de leurs vestes. A cet instant, il était certain que Iseul serait digne successeur de Alix et qu’il n’y aurait probablement aucune amélioration de ce côté-la. ...t’es sure ? De vouloir les rencontrer. Bien qu’il avait été le premier à lui demander d’annoncer à ses parents qu’elle n’avait eu aucune difficulté à venir. Ne faisant alors aucune diversion, il s’était contenté de l’observer dévaliser une partie de la nourriture, tout droit dans son sac. ...non, c’est pas...Exactement comme ça que ça marche mais ils aiment ça...je crois. Il espérait pour eux au fond, qu’ils se plaisent ici à y passer la plus part de leur temps. Qu’eux au moins ne ressentaient pas cette pression constante et que leurs vies étaient plus faciles que la sienne. Son regard dévie de sa silhouette, évitant de justesse de perdre ses mains une seconde fois. Quelques secondes perdues sur les lieux et les personnes dispersées jusqu’à être si rapidement ramené à elle dans un sursaut, sentant ses mains se perdre dans les poches de sa veste. .....tu sais qu’il y en aura encore plus tard, noona ?  La source inépuisable de ces soirées l’étonnera toujours. D’un nouveau sursaut, il avait presque arrêté ses mains. Mais est-ce qu’on l’écoutait ?  ahaha...le pantalon c’était pas une super bonne idée noona je Il pourrait plus s’asseoir sans entendre les petits fours craqués ?! Et, pas qu’il s’en souciait, mais elle venait sûrement de ruiner le costume.   je...Non, ça va- Un peu rouge, la voix presque étranglée, il baisse les yeux vers les bosses formées au niveau des différentes poches, se demandant si s’était réellement discret. Sûrement pas.  Personne n’y touchera. La fontaine. Personne ne s’y risquerait. Et il se demandait si à présent la découverte des tables parsemées d'apéritifs derrière elle, elle découvrirait à quel point la soirée serait longue et pleine d’ennui, maintenant qu’ils étaient postés là.

...tu veux voir un endroit plutôt cool? Sorti de nulle part, Seo brise le silence. Il reste encore quelques secondes sans bouger encore, jetant un coup d'oeil en sa direction. Gonflant le torse comme on inspire le courage, sa main dérobe l’une des bouteilles sur l’un des plateaux de serveur et l'attire à sa suite, poussant l’une des portes pour atteindre le hall d'entrée. Fuyant l’afflux de personnes et s’éloignant des festivités, leurs pas résonnent à l’unisson jusqu’à une toute autre porte, pourtant similaires aux autres. Soudainement coupé du bruit lorsqu'elle se referme après leur passage, seule la nuit éclaire la pièce par le balcon principal, face à eux. Énorme, gigantesque, démesuré, donnant sur les jardins extérieurs illuminés de nombreuses lampes comme s'il s'agissait du reflet au ciel. Et il l’avait entraîné jusqu'au rebord, posant la bouteille là. Peut-être qu’il cherchait à garder l’illusion le plus longtemps possible, de voir encore les étincelles dans ses yeux, celles que lui avaient perdu.

« Bien sûr que je suis sûre. » répondit-elle sans la moindre hésitation. Elle n'avait pas peur de les rencontrer, ses parents. Ils étaient des personnes comme les autres, et il se trouvait juste qu'ils étaient les parents de Seo. Une coïncidence comme une autre. Ce n'était pas non plus comme si elle s'apprêtait à rencontrer ses beaux-parents haha... hahaha... Unless ? D'autant plus qu'ils avaient l'air différents, venus d'un autre monde, celui qui n'avait jamais été le sien et qui s'y heurtait abruptement dans une nuée de différences. Peut-être bien qu'au fond, ça lui faisait un peu peur, mais si c'était pour Seo, alors elle ferait le pas. « On ne sait jamais Seo. Tout ça pourrait s'envoler en un rien de temps. Qui sait si on aura une autre occasion de les prendre ? » Personne ne savait. La vie était faite d'imprévus incontrôlables qu'on ne pouvait pas deviner. Quelles autres chances comme celle-là pouvaient apparaître ? Quelles occasions encore ? Quelles nouvelles opportunités ? Et alors que son regard se reposa de nouveau sur le jeune homme, Iseul se permit un fin sourire. Son teint rosé lui donnait un côté adorable qu'elle ne pouvait s'empêcher de lui accorder, tout comme elle ne pouvait empêcher ses yeux de s'attendrir. Seo n'était pas comme les autres. « Je te fais confiance pour que personne n'y touchera oui. Le sort des 404 repose sur tes épaules. » ajouta-t-elle pour le taquiner.

Un endroit cool qu'il lui promettait. La Hwarang ne savait aucunement à quoi s'attendre mais elle l'avait suivi, intriguée par ce qu'il avait en tête. En marchant, elle avait laissé ses prunelles s'accrocher à chaque détail de la décoration, de l'architecture de la bâtisse. Elle n'avait jamais rien vu de tel et il semblerait qu'elle ne soit pas au bout de ses surprises. C'était comme si le plus jeune avait ouvert une porte sur une toute autre partie du monde. Une partie qui avait toutes les raisons de l'émerveiller encore plus qu'elle ne l'était déjà. Sans attendre, elle s'était avancée sur la terrasse, les mains posées sur le balcon tandis que son regard se perdait dans l'horizon de fleurs qui s'étendait devant elle. La lumière de la lune donnait une touche mystique à cette scène, la rendant surréaliste et tout simplement splendide. Le paradis. Éblouie, la jeune femme s'était penchée sur le balcon, laissant ses coudes se reposer dessus pendant que sa tête retombait sur ses mains.  « Elle te plaît, cette vie, Seo ? » dit Iseul, brisant le silence. À le voir squatter de plus en plus l'appartement miteux des 404 ou se comporter comme tous les garçons de son âge à la situation modeste, la jeune femme avait du mal à croire qu'il pouvait venir de cet univers-là, rempli de strass et de paillettes. D'autant qu'il n'en parlait pas vraiment. Il ne lui parlait pas tellement de sa famille, de sa vie chez les Im, de son passé. Elle ne lui avait jamais posé la question. Peut-être qu'elle devrait, lorsqu'ils iraient se promener dans le jardin toute à l'heure. Elle en mourait d'envie. « Tu as froid ? »

Le sort des 404 reposait sur ses frêles épaules, ou plus exactement ses poches pleines à craquer d'une nourriture gratuite et volée. Qu'est-ce qu'ils feraient, si il n'était pas là pour remplir le réfrigérateur de temps en temps ? .....et..... oublie pas Isaak. Ca aime quoi les russes ?  Soudainement, il se perd à contempler le buffet, ajoutant ce qui lui semblait sortir des coutumes comme si ce détail était vital à sa survie.

Les invités cessent doucement d'affluer, prenant part aux différentes discussions et s’emparant des coupes de champagne dispersées sur les plateaux des serveurs traçant leur chemin. L'ennui n'a pas le temps de s'installer, Seo l'entraine et fuit l'espace bondé, poussant quelques portes pour se perdre là où ils n'auraient pas du, l'accès probablement interdit et pourtant vide. Le lieu dérobe l'attention, coupe le souffle et il s’avancent sur le balcon, le regard sur le jardin ne s'y attarde que quelques minutes pour le détourner sur elle. Le sourire dans un soupire, il garde son soulagement pour lui  et c'est la surprise qui l'effacera d'un simple clignement de paupières. Il ne s'attend pas à cette question, plus sérieuse qu'il n'y parait et le laisse face à un blanc. Est-ce qu'il aimait cette vie ? Il n'aimait pas ces soirées, monopolisant des heures de jeu. Il n'aimait pas ce costume et préférait largement les joggings ou les vêtements larges. Il n'aimait pas paraître et il n'aimait pas les obligations, il avait finalement et simplement...Appris à faire avec.  Mais il le sait, il connait son statut de privilégier, alors il ne dit rien, il ne dit pas à quel point quitter le lycée l'avait blessé. à qui ça ne plairait pas, noona ? Je peux avoir tout ce que je veux Le sourire est présent, pourtant, il y a plus que ça à dire. Il a toujours été plus que ça, à se cacher derrière une apparence si lisse. elle te plairait ? Curieux, renvoyant la question. Est-ce qu'elle aimerait, elle, devoir porter des robes de princesse et parader devant les yeux de plusieurs sociétés ? Il secoue vaguement la tête, tapote ses poches en écrasant sûrement un biscuit ou deux et croise les bras sur la rambarde.   les petits fours, ça réchauffe haha... Tu as froid toi ?  

Déjà qu'Iseul ne savait aucunement ce qu'Oven, le chat de la coloc, aimait; comment Seo pouvait-il s'attendre à ce qu'elle sache ce qu'un russe aimait ? C'était insensé, inimaginable. Alors la jeune femme s'était contentée de hausser les épaules avant de se laisser de nouveau porter par l'atmosphère sur-mystique du balcon. Peut-être bien que pendant quelques secondes, elle s'était sentie comme une princesse, perchée là, le monde étendue devant elle. Mais Iseul se sentit bien vite petite, si petite, presque comme engloutie dans un univers qui ne lui appartenait pas. Tout ça lui semblait bien trop démesuré, elle ne s'y sentait pas à sa place. Il n'y avait... pas assez de bazar, de désordre comme il pouvait toujours y en avoir chez les 404. Là où tout était si bordélique qu'elle arrivait étrangement et facilement à s'y retrouver. Un paradoxe sans nom. Alors, quand le plus jeune lui répondit, elle n'avait pas pu nié cet aspect de cette façon de vivre. « Mh, c'est vrai. » Elle n'avait pas l'air convaincue, et au fond, Seo ne semblait pas vraiment l'être non plus. Il y avait peu d'entrain dans ses mots, comme s'il balançait une phrase bateau. « Je ne pense pas qu'elle me plairait, cette vie. Je suis bien comme je suis, Seo. Je n'ai pas besoin de plus. » déclara-t-elle en observant le ciel sombre et teinté de quelques éclats. Oui, c'était vrai, la Hwarang se contentait bien de ce qu'elle avait. Rechercher plus n'avait toujours été qu'une source de désarroi, de tristesse, de déception. « J'ai un peu froid, oui. » Elle n'avait pas hésité à se rapprocher du jeune homme, passant de nouveau son bras autour du sien pour les enlacer. Puis elle posa sa tête sur son épaule, cherchant un certain réconfort. Heureusement qu'il était légèrement plus grand qu'elle, même avec ses talons. Seoeon faisait un excellent coussin, c'était ce qu'elle s'était personnellement notée quelque part dans sa tête. « Merci de m'avoir montré cet endroit d'ailleurs. Je t'avoue que c'est bien mieux que cette salle. L'ambiance y est étrange. » avoua-t-elle doucement. « On peut aller dans le jardin aussi, si ça te tente ? »

Cette vie n’avait jamais été la sienne, pourtant devenu un quotidien où il avait su y faire sa place sans l’avoir désirée et l’argent avait su arrondir les angles. L’argent avait su lui apporter cette facilité qu’il aimait tant. Et à présent, est-ce qu’il se voyait réellement finir ses études et se lancer dans l’ouverture d’un bookstore? Seoeon aura changé, terriblement changé, laissant ce rêve derrière lui, incapable d’y retourné. Malgré les costumes à porter, les responsabilités qui lui tomberont plus tard sur ses épaules, il ne se voyait plus dans un autre monde que celui-ci. Pas spécialement heureux à propos de lui, mais pas non plus malheureux. Il hoche doucement la tête, le regard rivé sur le jardin, avant de sourire plus doucement. Elle n’avait besoin de rien ? Comment on ne pouvait pas vouloir d’un peu plus d’argent ?  Même pas les derniers jeux sortis ? A moins que ce ne soit vrai, qu’elle n’aie jamais cherché plus, moins corrompue que lui finalement.   je Son souffle se bloque et son corps est soudainement de pierre au moment où elle s’empare de son bras et le touche. L’espace personnel, décidémment, à croire que personne ne connaissait. Il respire à nouveau, avant de mourir d’asphyxie.  de rien.... Noona Il articule, tousse et déglutit. Un autre lui aurait sûrement prêté sa veste, enlevé comme un parfait gentleman mais Seo, lui, il reste planté là, sans bouger, supposant que par sa proximité, les petits fours faisaient leurs efforts à travers la poche jusqu’à elle. c’est parce que personne cherche à s’amuser, là dedans...  c’était pas ce genre de soirée, c’était jamais sympa, d’aussi loin qu’il s’en souvienne. C’était une simple corvée, dont la nourriture rendait le temps un peu plus agréable. Mais quand la faim était passée, alors...L’ambiance du jardin était parfois beaucoup plus préférable. Il se détache de la rambarde d’un nouveau hochement de la tête à se proposition et entame les premiers pas vers les escaliers menant au jardin. Ils avaient tout le temps de toute façon. tu m’as jamais parlé de tes parents...  Alors que lui, il ne lui avait jamais parlé des siens.

Deux mondes s'échouant l'un contre l'autre, s'unifiant peut-être dans la collision. C'était comme s'ils avaient trouvé le moyen d'associer l'insociable pour y ajouter leur fantaisie, créant un univers à part, capable de les lier lors de tous ces moments passés ensemble. Seoeon et Iseul. Quel terrible et singulier duo. « Je peux toujours attendre un peu avant d'acheter un nouveau jeu. Et puis ça me permet de savoir si je le veux vraiment ce jeu, au lieu de me rendre compte qu'il était naze et que j'ai dépensé mon argent pour rien. » expliqua-t-elle. La Hwarang subsistait avec le peu qu'on lui donnait, même s'il s'agissait de la plus grande misère qui soit. Elle vivait avec le poids d'une société qui pensait que jamais rien n'était assez, tandis que son cœur se sentait contenté. Quel affreux monde. Iseul orna son visage de son sourire, se contentant de ce que Seo voulait bien lui donner, même s'il s'agissait de la plus banale tape dans le dos. « C'est vrai. C'est mieux quand on est que tous les deux au final. » dit-elle, en observant le paysage devant elle, son bras enroulé autour de celui du jeune homme. Les manches absentes de sa robe ne lui portaient pas tellement chance. Si bien qu'elle finit par en regretter ses vieux sweats puants la pizza et la transpiration. L'odeur de la maison. Loin des eaux de Cologne et des parfums trop forts qu'on finissait par en avoir la tête qui tourne. Un peu comme à cet instant, alors qu'Iseul commençait à descendre les escaliers au même rythme que Seoeon. « Oh.. Mes parents. C'est une histoire compliquée. » Un sujet qu'elle ne partageait pas vraiment. Pour preuve, personne n'en savait vraiment rien. On ne lui posait jamais la question ou alors on n'arrivait jamais au moment où elle se sentait assez libre pour raconter de tels détails de sa vie. « J'ai toujours vécu avec mon frère, tu sais. Et ma mère... » Elle chercha les mots, pensive tandis qu'ils s’immisçaient un peu plus dans le labyrinthe de fleurs. « ...n'est pas un cadeau. » Iseul repensa à toutes ces fois où cette femme ne l'avait jamais vraiment considéré comme sa fille, préférant se soucier de ce qu'il y avait dans son compte en banque plutôt que de ce qu'il y avait dans l'assiette de ses enfants. « Et... je ne sais pas qui est mon père. » La voix qui baisse d'un ton. La Iseul qui courrait après chaque information potentielle sur son père n'existait plus, pourtant ses tourments perduraient encore dans ses mots.