D’un simple regard, l’amour est né. Et quelques années plus tard, un nouvel être a rejoint ce monde, preuve d’un amour véritable.
Ma mère a toujours aimé raconté son histoire d’amour et sa rencontre avec mon père. C’était l’histoire qu’elle me racontait lorsqu’elle essayait de m’endormir, le soir. Nous étions encore en Chine à cette époque mais les projets de mon père n’allaient pas tarder à se concrétiser et à demander une présence plus importante en Corée du Sud, le pays dont il était d’origine. Il avait quitté sa terre natale pendant plusieurs années, décidant de rester sur place après son échange universitaire en Chine. Ma mère avait du charme et avait visiblement su comment le retenir. Sauf que monsieur avait besoin de voler de ses propres ailes, professionnellement parlant et de faire ses preuves en ayant toutes les cartes en mains. Il voulait prendre la main sur une entreprise en déclin qu’il se sentait apte à relever. Mon père a toujours eu de la détermination et il n’a pas froid aux yeux. Il avait déjà de l’argent, par sa famille, alors il ne lui manquait plus que de s’imposer définitivement et de faire la différence pour marquer le monde des affaires.

Ce fut presque trop facile. On changea plusieurs fois de logement, pendant quelques années, toujours pour avoir plus grand jusqu’à qu’on se lasse et se contente d’un luxueux appartement à Gangnam. Le nom de mon père commença à se faire connaître. Il s’était fait remarqué pour son succès et son talent de négociateur. Il pouvait mettre tout le monde dans sa poche en quelques minutes à peine grâce à ses talents d’orateur. Je regarde encore à ce jour ses interviews avec des étoiles dans les yeux, impressionnée par sa facilité à parvenir à ses fins. Rien ne lui fait peur et rien ne l’arrête… Cette détermination est peut-être incroyable et admiratrice, mais elle est aussi un poison à d’autres niveaux. Toujours sourire, ne jamais dire non et blesser les gens qui peuvent nous intéresser. Se sentir plus puissant que de raison et s’autoriser un luxe parfois étouffant. On s’y fait bizarrement. Rapidement. Pathétiquement. Le pouvoir, l’argent, ça devient agréable et on veut toujours plus. Parfois je me dis que mon père a dû perdre la tête en ayant autant d’objectifs et autant de personnes mesquines dans son entourage. Il est devenu un serpent vénéneux pour ne pas se faire avoir même s’il redevient l’homme qui m’a vu grandir, une fois le costume rangé dans le placard.

J’ai grandi dans un environnement sain. Je n’avais pas besoin de m’inquiéter pour l’avenir car j’avais tout ce dont j’avais besoin. Tout était si facile. Je devais être une bonne élève et me tenir sagement, pour être à la hauteur de la réputation de ma famille. Parfois, j’avais l’impression de jouer un rôle et ça me plaisait. Ce fut finalement mon terrain de jeu, mes établissements scolaires. Je m’amusais innocemment mais un jour, ça se retourna contre moi. On n’appréciait pas vraiment la petite princesse hautaine qui passait dans les couloirs en faisant sa loi. Ce n’était pas toujours le cas mais je pouvais avoir tout ce que je voulais en claquant des doigts alors, pourquoi m’en priver ? J’entendis des critiques à mon égards, dans les couloirs ou dans les vestiaires. Des rumeurs arrivèrent également à mes oreilles et je me sentis humilier à plusieurs reprises. Les gens étaient trop lâches pour venir me le dire en face, on ne cessait de me sourire mais je voyais bien que j’étais entourée de personnes fausses. J’avais repéré cette langue de vipère qui ne me portait pas dans son cœur, visiblement. Elle avait du mal à le cacher pour sa part et ça m’intrigua. Sauf que je me sentais trop humiliée et, n’ayant s jamais vécu ça, il était hors de question que je laisse cette mascarade continuer. Elle fut mon exemple. A mon tour, je décidais d’user de magouilles pas très « réglo » sauf que j’avais un atout considérable dans ma manche : mon père et ses investissements dans notre école. Ce ne fut pas difficile de rejeter certains faits sur la demoiselle et de la faire quitter notre lycée sans qu’elle ne puisse demander son reste. Je fus tranquille. Apaisée. Puis, vide. Ça avait été si facile. J’aurais pu briser une vie si je l’avais voulu et, sans même me salir directement les mains. Je pouvais tout faire et si ça pouvait en délecter certains, je n’étais pas certaine que ça soit mon cas. Cette fille se vengea mais encore une fois, je m’en sortis sans égratignure. L’argent.

사랑

Je l’avais rencontré alors que j’avais à peine 17 ans. C’était le fils des voisins, une famille que mes parents appréciaient et qu’on voyait régulièrement. Au bout de quelques mois, on a décidé de se mettre en couple. Je me remettais d’une rupture dont je n’avais parlé à personne. Il était là, on se comprenait. On était du même monde et pourquoi pas ? Je pense avoir été attachée à lui. J’ignore si on peut parler d’amour car j’appréciais surtout l’image qu’il me permettait de renvoyer. J’avais toujours de beaux bijoux sur moi, des cadeaux de sa part, et j’avais l’impression que ça renvoyait le bonheur que j’étais censée éprouver. Je n’étais pas sûre de mes sentiments mais ça se passait bien alors pourquoi tout perdre ?
On était jeune mais ensemble depuis plus de 3 ans. On approchait de notre quatrième année de relation. Il me demanda en mariage. J’avais à peine 21 ans mais, je me pensais prête. Les préparatifs fut une vraie partie de plaisir mais une fois l’excitation passée, les doutes s’installèrent en moi. Est-ce que je voulais vraiment avoir la bague au doigt ? Est-ce que je voulais passer le restant de ma vie avec cet homme ? Pourquoi avais-je l’impression de ne le trouver de moins en moins attirant, de jour en jour ? Pourquoi est-ce qu’il m’énervait soudainement, pour tout et n’importe quoi ?
Mes parents semblaient enchantés mais je ne l’étais guère. J’ai essayé d’en parler mais mon père m’a reproché de faire une crise. Que j’étais encore qu’une enfant qui ne réfléchissait pas. Je devais être bête, d’après ses dires même si la colère devait parler en son nom. Je me suis tu, j’ai baissé la tête et j’ai arrêté de partager mes inquiétudes.

Le jour fatidique, je me suis sentis magnifique dans ma robe de mariée mais mon cœur était serré et des larmes ont coulé. Sur un coup de tête, j’ai alors pris la décision de m’évaporer et d’échapper à cette vie que j’avais cru mienne. Je n’avais jamais essayé de vivre pour moi, en faisant mes propres choix et en me confrontant à la réalité. J’ai toujours été la fille à papa, celle qui se cachait derrière un nom mais c’était terminé. J’avais des rêves que je n’avais pas chercher à réaliser. Parce que je ne voulais plus la porte facile pour ensuite entendre des critiques sur ma « chance » et mon absence de talent. Hors de question.
Le problème néanmoins… c’est que je n’avais pas mesuré l’impact de ma décision lorsque j’ai fui la salle du mariage. Et quelle salle magnifique par ailleurs… Je me suis retrouvée seule face à un monde effrayant… Je me suis alors tournée vers une âme généreuse qui a m’a laissé emménagé dans son appartement. La transition n’a pas été facile et j’en subi encore les frais même si j’ai soif d’indépendance et de renouveau, loin de ce monde de faux semblants. Certes, il m’arrive encore de faire les yeux doux à papa mais je fais de mon mieux. Je crois. Jusqu’à la prochaine crise, je suppose...

Ce départ du foyer familial m’a également donné l’occasion de faire face à mes vieux démons et de nouveaux tracas se sont installées dans ma tête. Je repense à ces personnes croisées par le passé, à ses amourettes sans importance. A ce garçon qui m’avait donné l’impression d’être plus qu’un nom et qu’une enveloppe corporelle. J’ai finalement l’impression de n’avoir jamais vraiment aimé parce que je me suis toujours retenue ; je n’ai jamais osé me montrer à nue aux autres, même à ceux qui m’aspiraient confiance.
Je repense aux personnes que j’ai blessé parce que je n’étais pas ouverte d’esprit, enfermé dans ma prison dorée. Je me rappelle de la douleur d’avoir vouloir appartenir à des groupes qui n’étaient pas faits pour moi. Je me souviens parfaitement de ces jeunes que je voyais danser dans la rue et que j’avais voulu rejoindre. Il était là. Ce garçon qui me plaisait. Je n’avais même pas osé dire que je venais d’une école privée et que je n’avais aucun souci à me faire pour l’avenir. J’avais prétendu avoir les mêmes problèmes qu’eux alors que je ne les comprenais même pas… J’étais trop différente mais une nouvelle fois, j’avais opté pour un rôle. Et finalement, la personnalité de ce personnage se révéla proche de la mienne, celle que je cachais parfois par peur du regard des autres. Ce fut agréable mais leur réalité m’effraya et je n’ai pas réussi à conserver ce rôle, la vérité finit toujours par éclater... Ils trainaient dans des affaires louches pour s’en sortir, ils ne dormaient pas toujours tranquillement même s’ils restaient, en apparence, des adolescents comme les autres. Leur problème ont failli devenir les miens mais j’ai fuis, comprenant ce que ça signifiait. Ce que ça pouvait couter à ma famille si je mettais vraiment le nez au mauvais endroit. Au lieu d’être une amie loyale, j’ai commis des fautes au lieu de simplement m’évaporer. Mon masque est tombé et j’ai perdu ce rôle que j’appréciais. La rupture a suivi, sans surprise et m’avait laissé au plus mal. Si je n’avais peut-être pas aimé comme j’aurais pu, la douleur avait bien été présente. Car j’avais été rejetée et je ne comprenais pas pourquoi. Ça ne m’arrivait jamais.

A présent que la vie est moins confortable, je me rends compte de toutes mes erreurs du passé mais au lieu de me morfondre, ça me donne la motivation nécessaire pour évoluer et faire mes preuves. Je ne suis pas du genre à m’arrêter sur mes erreurs du passé même si, à l’inverse, ça ne m’empêche pas d’avoir la dent mauvaise quand il s’agit des erreurs des autres. Egocentrique ? Juste un peu !